La brique du chef d’entreprise

La brique du chef d’entreprise
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La brique du chef d’entreprise

On dit souvent que le Belge “a une brique dans le ventre” . Le chef d’entreprise ne fait pas exception à cet adage. De nombreuses sociétés familiales se retrouvent au fil du temps propriétaires d’un immeuble d’exploitation, ou de plusieurs, voire d’autres biens immobiliers (immeubles de rapport, maison d’habitation…). Lors de la cession de l’entreprise, ces biens immobiliers sont souvent l’enjeu de discussions animées entre le cédant et l’acquéreur.

Chaque cession d’entreprise n’englobe pas nécessairement un immeuble. Il est parfaitement possible de céder un fonds de commerce ou une société d’exploitation sans immeuble. Dans ces cas, l’acquéreur devra bien entendu prêter attention au bail qui pourra avoir un impact significatif sur la pérennité de l’entreprise ou sur sa situation financière.

Voici quelques conseils pour éviter les éventuelles pierres d’achoppement lorsqu’un ou plusieurs immeubles font partie de la société à céder.

Retenons pour premier principe qu’une cession doit être bien préparée. Vouloir céder une société qui détient des actifs non liés à l’exploitation n’est pas une bonne idée. En effet, il sera très difficile de trouver un acquéreur qui sera prêt à payer un bon prix pour des actifs dont il n’aura pas nécessairement besoin, car il souhaitera plutôt garder ses moyens financiers pour le développement de l’activité. Ainsi, il faudra sortir de la société l’appartement à la mer ou la maison d’habitation, lorsque celui ou celle-ci se trouve dans la société d’exploitation.

Dans le même esprit, il est important que l’immeuble soit tout à fait prêt à être cédé. Ceci semble une évidence, mais il arrive souvent que, par exemple, la séparation entre le privé et l’exploitation ne soit pas encore effectuée ou que les compteurs ne soient pas séparés. Si les travaux n’ont pas encore pu être effectués, il faudra au moins les avoir planifiés et chiffrés.
Lorsque l’immobilier est démembré (usufruit, bail emphytéotique ou droit de superficie) ou a été financé par leasing immobilier, il y aura lieu d’examiner à l’avance quel montage sera le plus approprié tant pour le cédant que pour l’acquéreur.

La question de la pollution des sols doit être adressée dans tous les cas au moment de la cession. Car les frais de dépollution sont souvent très importants et l’acquéreur ne voudra pas prendre ce risque. Ce point fait généralement partie de l’audit d’acquisition. Même s’il n’est pas détecté à ce moment, il risque de ressurgir ultérieurement et faire l’objet d’un litige entre les parties en tant que vice caché ou faisant partie des garanties d’actif et de passif.

La valeur de l’immeuble doit être objectivée le plus possible. Une expertise immobilière par un expert indépendant de préférence agréé par les banques sera fort utile. Il ne sert à rien de vouloir gonfler le prix de l’immeuble, car cela risque de faire fuir les acquéreurs.

L’incidence fiscale doit également être prise en compte. Lorsque l’immeuble se trouve dans une société dont les parts sont cédées, il n’y aura pas de droits d’enregistrement à payer, ni d’impôt sur la plus-value. Mais l’acquéreur n’aura pas la possibilité d’amortir son investissement. Il est donc logique que l’immeuble en société subisse une décote. Le montant de cette décote peut être négocié entre les parties (au maximum le montant de l’impôt sur la plus-value).

L’écueil le plus important en matière d’immobilier d’entreprise est sans doute la question du financement. La durée de financement d’entreprises est nettement plus courte (souvent 5-7 ans) que pour l’immobilier classique (15-20 ans). Lorsque la valeur objective est importante, mais que la rentabilité de l’entreprise est faible, il sera impossible pour le repreneur de réaliser son montage financier, à moins d’apporter des fonds propres importants. Il faudra alors être créatif pour trouver des solutions acceptables pour toutes les parties. Dans certains cas, il sera possible de faire un “push down” de la dette (remplacer un crédit dans la holding d’acquisition par un crédit dans la cible) afin d’étaler le financement sur une durée plus longue. Une autre alternative est de céder d’abord le fonds de commerce et de garder l’immobilier qui sera loué à l’acquéreur, avec éventuellement une option d’achat. Cette solution permet à l’acquéreur de financer l’achat plus facilement, en deux phases. Mais le coût fiscal pour le cédant sera plus important car il s’agit d’une cession d’actifs.

L’immobilier d’entreprise est souvent un enjeu important lors de négociations à l’occasion de cessions d’entreprise. S’agissant généralement d’un bien d’une valeur patrimoniale considérable, il n’est pas toujours aisé de le financer. Il est donc important de réfléchir ensemble au meilleur montage juridique et financier afin de mettre en place une opération intelligente et équilibrée.