Une reprise est-elle encore attractive ?

Une reprise est-elle encore attractive ?
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Une reprise est-elle encore attractive ?

La pérennisation des entreprises familiales est un enjeu majeur vu le poids qu’elles représentent dans notre économie. Ces entreprises, se caractérisant par une vision long terme sont souvent porteuses de nombreux emplois.

Dans ce contexte, une large enquête réalisée par l’UCM en octobre 2013, qui a fait l’objet d’une synthèse dans La Libre Entreprise du 23 mars 2014, conclut que plus de 55 % des entreprises seront à céder dans un délai de 5 ans, et 2/3 d’entre elles n’ont pas de repreneur en vue. Par ailleurs, la transmission à des tiers est privilégiée (55,2 %) par rapport à un membre de la famille (12 %). Ces chiffres sont d’autant plus interpellants que déjà en 2006, selon une étude réalisée par l’Institut des Entreprises Familiale (IEF), 1/3 des dirigeants avaient plus de 60 ans et 80 % des entreprises familiales allaient changer de mains au cours des dix années suivantes, alors que seulement 45 % préparaient cette transition.

Faut-il dès lors conclure que rien ne se fait en la matière ? Rien n’est moins sûr. Certaines initiatives ont vu le jour au cours des dernières années, afin de faciliter la transmission des entreprises. Ainsi, il existe actuellement plusieurs plateformes informatisées qui permettent aux cédants et aux acquéreurs de se rencontrer. Un matching parfait n’est évidemment pas visé par cet outil, mais il permet souvent aux candidats acquéreurs de détecter plus rapidement des cibles cadrant avec leur profil de recherche. Si le sujet de la cession d’entreprises reste assez technique, il faut admettre que l’information est désormais largement disponible.

De nombreux colloques, articles de presses, et sites internet permettent aux candidats cédants ou acquéreurs de se documenter. Il existe aussi des cycles de formation, tels que le “Club des Repreneurs” qui abordent les différents aspects de la reprise et permettent aux candidats d’échanger leurs expériences. La Sowaccess, en tant qu’animateur de la transmission d’entreprises en région Wallonne, est à la manœuvre pour la plupart de ces initiatives. Elle a également mis en place des aides financières spécifiques (Diagnostic Cession et Test Repreneur), lui permettent d’obtenir une aide pour recevoir un accompagnement professionnel.

Alors quels sont les freins à la cession qui font que tant d’entreprises ne se transmettent pas ou difficilement ? Comment se fait-il que certains dirigeants déconseillent à leurs enfants de reprendre ?

Les causes de cet échec sont multiples, mais il nous semble que l’obstacle majeur réside dans l’attractivité décroissante de la fonction de chef d’entreprise.

La faible santé financière des entreprises à céder n’a échappé à personne, et l’enquête UCM le révèle clairement. Nos petites entreprises surtout, déjà faiblement capitalisées et peu rentables, ont été malmenées par la crise économique. Loin du mythe, de nombreux dirigeants sont en réalité dans une situation financière délicate, accablés par les dettes et les obligations fiscales et sociales. Lorsque les temps sont durs, le premier poste de frais dans lequel on coupe, est souvent sa propre rémunération. Aujourd’hui, il n’est pas rare que le chef d’entreprise soit moins bien rémunéré que ses employés, non seulement en taux horaire, mais parfois même en valeur absolue.

Ce stress financier se double parfois d’un grand découragement face aux complexités administratives. Dans une petite structure, le dirigeant ne peut pas s’offrir les services de spécialistes en tout genre, et doit donc lui-même faire face à d’innombrables courriers, formulaires, contrôles, etc.

Il faut admettre de surcroît que les structures d’accompagnement à la cession sont plutôt orientées vers les PME que vers les TPE. Ainsi la plupart des cabinets de cession ne s’occupent pas d’entreprises de petite taille, pour lesquelles le travail est identique mais la rémunération moins importante. Les repreneurs aussi recherchent généralement des entreprises avec une taille minimum.

Il faut dès lors se réjouir que l’UCM, le porte-parole des TPE et indépendants, se mobilise pour cette cause et la mette à l’agenda de notre prochain gouvernement, en proposant des mesures concrètes. Seront-ils entendus ? Au-delà de tout clivage idéologique et politique, il faut prendre conscience qu’il faut encourager ceux qui aujourd’hui osent encore prendre des risques, s’endetter, et travailler durement. Qu’ils puissent en récolter les fruits, pour le plus grand profit de toutes les parties prenantes des entreprises qu’ils dirigent.

Illustration : Clou